Revisite très réussie d'un album qui prenait la poussière, musiciens tip-top, enfin Ange en DVD pas coupé !

Note globale


Technique encore faiblarde par rapport au monstre sacré sur scène

Editeur : Musea
Durée totale : 2 h 00

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Image        NTSC

Rien

Une image entre sympathique et énervante, entre professionnelle et gâchée, entre couleurs (qui bavent un peu) et noir trop profond. On sent qu'il y avait une bonne équipe derrière, on sent aussi qu'ils n'avaient peut-être pas totalement compris les enjeux. Carton jaune au montage "metaaaaaaaaaaal".
La stéréo est assez claire, plutôt brillante, et souffre pas mal de la compression AC3. Le 5.1 est très chiche dans ses effets, mais quand ils sont là, ça donne un coup de fouet. Et il souffre beaucoup de la compression AC3. Merci, AC3.
L'intégralité d'un album revisité pour le meilleur, des nouveautés, des surprises, le tout ayant malheureusement un peu de mal à se tenir. Ce qui ne signifie pas qu'on s'ennuie, très loin de là.
A bon chat bon rat, tra la la...

On dit que les anges n'ont pas de sexe. M'étonnerait. Il y en a un qui bande dur comme fer depuis 35 ans sur toutes les planches de France et de Navarre. Pas navarre en concerts, donc. Ange, dans les faits et dans les chiffres, est LE groupe de rock progressif Français qui a le plus vendu, le plus fait parler de lui, le plus percé à l'étranger, et paradoxalement c'est aussi un groupe terriblement identitaire (et identifiable). Ce n'est pas un hasard si Steven Wilson (de Porcupine Tree) leur voue un culte, pas un hasard non plus s'ils étaient appelés "les Genesis Français" dès 1972, pas un hasard enfin si leurs copains s'appellent Thiéfaine ou Ferré. S'appuyant sur les textes très coquins et léchés de Christian Décamps, poète à la voix de velours ambré (velours brun houblon, au choix), le groupe (qui a multiplié les line-ups) a toujours su se réinventer tout en gardant sa patte, même si la période la plus significative restera la méconnue 78-80, celle où nos Frenchies ont proposé un rock prog teinté de hard, de FM et de groove bien avant tout le monde. Et si tous les disques n'ont pas fait l'unanimité, Ange gardait toujours une réputation de tueurs en live : il était donc fort dommage qu'aucun DVD live digne de ce nom n'ait été disponible pendant longtemps.
Mais avant de nous pencher sur l'objet du délit, revenons quelques instants sur l'entité Ange. Le chanteur est le seul rescapé de la formation originelle, dans ces conditions qu'est-ce qui a permis au groupe de devenir aussi puissant ? Et bien simplement que les nombreux musiciens qui y sont passés ont toujours été des zicos d'exception. C'est bête à dire, mais Ange a toujours, du début à la fin, comporté en son sein de vrais guitaristes, de vrais batteurs, de vrais bosseurs quoi, et il serait bon de rappeler cette recette (pourtant digne de l'omelette) à nombre de groupes rock franchouillards qui régulièrement oublient cet ingrédient. Cependant, il faut être honnête et avouer qu'Ange n'a jamais connu un line-up aussi brillant que maintenant, tous les musiciens étant des virtuoses dans leur domaine. Les "anciens nouveaux" regrettent évidemment le départ d'Hervé Rouyer, cogneur d'exception, mais son remplaçant Benoit est d'un niveau que nombre de batteurs pourraient envier. Pour les autres, il n'y a que des tueurs. D'abord, d'abord, y'a l'ainé, qui n'a pas le melon, qui a eu du nez, et qui s'est fait un nom, très habile de ses dix doigts, pas encore cuit, et toujours le roi au royaume enchanté du french prog, ses rimes vicieuses enjolivées par une voix unique (ou presque) qui peut rebuter les amateurs de choses plus lyriques à la LaBrie ou Pagny. Faut vous dire, m'sieur, que chez ces anges-là, on ne chante pas, m'sieur, non, on n'chante pas.... on conte !
Et puis il y a le fiston, des pétards dans les cheveux, qu'a jamais vu un peigne, et qui chante comme une teigne, dans une voix remplie de rage et pure à la fois, le tout avec un jeu de piano fantastique. On a toujours quelque appréhension à voir le fils d'un musicien débarquer dans un groupe, mais pour Tristan, le doute est vite dissipé : il a le niveau au-dessus en claviers, et surtout une voix qui ressemble à celle du père, mais avec des possibilités décuplées. En falsetto, en voix pure, en voix de tête, en spoken text, en chant hurlé, il est fabuleux, et semble promis à une fort belle carrière. Il n'y a qu'à l'entendre vociférer son désespoir sur la reprise de Polnareff. Faut vous dire m'sieur, que chez ces anges-là, on ne braille pas m'sieur, oh non on n'braille pas... on crie !
Et puis y'a la grosse basse qu'en finit pas d'vibrer, et qu'on attend qu'elle crève les tympans de toutes les vieilles et des vieux qui pensaient assister à un concert de Maxime Le Forestier (c'est d'ailleurs clairement le cas vu le visage déconfit, voire navré, de certains spectateurs filmés au premier rang). A la basse, Thierry Sidhoum ne fait pas de cadeau : slap, glissandos méchants, gros son gras qui rentre dans le lard, il groove tout ce qu'il peut. Mais ce n'est rien à coté de son compagnon d'armes, le jeune Hassan Hadji, haut la main un des meilleurs guitaristes français en activité. Maîtrisant solos mélodiques et power chords metal comme pas deux, il hisse le niveau déjà élevé du groupe vers des stratosphères qu'on retrouve plus souvent dans des pays comme les USA ou la Suède. Il est excellent, et encore sur ce concert on peut sentir qu'il n'est pas encore tout à fait lâché : impressionnant ! Mais faut vous dire m'sieur, que chez ces anges-là, on ne joue pas m'sieur, on n'joue pas... on riffe !
Et puis y'a la Crozat, qu'est belle comme un soleil, la seule femme du sexe-tête, qu'elle est leur bleu de ciel, même qu'elle est trop belle pour moi (NDBaker : m'enfin on sait jamais hein, l'appel est lancé), Caroline la sorcière, petite protégée des Décamps, capable de sortir les contre-chants féminins habituels au rock progressif lambda, mais aussi de pousser dans les graves au point que lorsqu'elle chante en trio avec Christian et Tristan, bien malin sera celui qui peut deviner qui chante quoi (j'ai même pensé à des overdubs, c'est dire le mimétisme). Elle est la dernière pierre de l'angélique édifice qui, vous l'aurez compris, n'est pas là pour plaisanter. Au niveau de la prestation scénique, ce DVD vous rassurera : oui, leur si célèbre réputation est méritée, bien que leur penchant poétique poussé à l'extrême puisse ne pas vous plaire. Mais au fait, quelle poésie peut bien se cacher derrière du rock ?
La réponse est dans le vent, comme dit l'âne : pour son premier disque versatile live officiel, Ange a choisi de reprendre, dans l'intégralité de son concept et de ses disgressions rimées, un de ses albums cultes des années 70. Alors qu'on s'attendait à la folie mellotronique du Cimetière des Arlequins, ou au rock fédérateur du génial Au-Delà du Délire, c'est sur le bucolique Par les Fils de Mandrin que le groupe a jeté son dévolu. On pourrait faire la moue : après tout, la face A de ce disque est relativement molle et abstraite, pas vraiment taillée pour la scène. Et c'est là que le groupe révèle son art : tous les morceaux, sans exception, sont bien mieux joués et produits que sur album, le son est dépoussiéré (sauf les claviers, hélas ou heureusement au choix), et du coup le concept se tient parfaitement, laissant le spectateur un sourire aux lèvres tout du long. Et quand enfin le rock s'éveille, la suite Couleur / Atlantis / Hymne prend une telle ampleur qu'on a l'impression d'écouter Par les Fils de Mandale.
Après, forcément, ça pâlit. Plus ou moins. Côté rythmique ça envoie toujours le bois, et côté chant Christian ne faiblit presque pas. Curieusement, ce sont les morceaux du petit dernier, Culinaire Lingus, qui passent le moins bien. Pour le reste, on regrettera l'absence de classiques, mais Quasimodo en est déjà devenu un, et que dire de cette reprise piano/voix du Bal des Laze, sinon qu'elle vous en collera des sueurs glacées dans le dos ? On aurait donc pu crier à la surprise de l'année si le DVD par lui-même n'était pas vraiment à la hauteur du groupe. Le son stereo est clair et relativement pêchu, mais le 5.1 manque de précision. Et pour cause, la piste 5.1 prend autant de place sur le disque que la stereo ! Forcément le son en pâtit. C'est d'autant plus dommage que par moments, la musique propose une spatialisation assez honorable. C'est rare, c'est souvent brouillon, mais c'est un début. On connaît des groupes plus fortunés qui n'ont jamais osé placer une seule note sur vos enceintes arrières.

L'image est également sujette à caution. Le lightshow proposé par le groupe est très agréable, et évidemment les musiciens eux-mêmes assurent le spectacle, mais le tout sur écran est un peu noyé entre une image trop sombre et des cadrages/montages pas toujours heureux. Il y a pire offense : si les quelques effets spéciaux pourris à la Peter et Steven passent bien, car rares et souvent sans couper les chansons, on ne sera pas aussi indulgent avec le monteur qui a voulu se la péter rock et donner dans la Pullicinerie moyenne gamme dès que ça s'énerve. De quoi filer mal au crâne, mais bon, malheureusement, si c'était le seul monteur qui ait jamais commis cette erreur, mon bon m'sieur... Le disque ne comportant aucun bonus, on doit donc se contenter d'un simple concert, mais n'était-ce pas déjà notre voeu le plus cher ? Déroutant, inimitable et extrêmement professionnel, Ange risque fort de marquer vos esprits, malgré un DVD de facture améliorable. Et c'est là que trente-cinq ans de carrière pèsent dans la balance : ce Live Tour 2003 est certes leur premier DVD, mais, ô joie, il ne sera pas le seul ! L'occasion de retrouver d'autres titres géniaux ? De gommer les défauts techniques ? De faire d'Ange LE groupe de rock Français devant Indochine ? Pour le savoir, il suffit... Mais il est tard, m'sieur. Il faut qu'je rentre chez moi...


02-10-2007

8 novembre 2003 - Mix Festival (Vielsalm, Belgique)


01. Par les fils de Mandrin
02. Au café du colibri
03. Ainsi s'en ira la pluie
04. Autour du feu
05. Saltimbanques
06. Des yeux couleur d'enfants
07. Atlantis
08. Hymne à la vie
09. Touchez pas à mon ciné
10. Gargantua
11. Le bal des Laze
12. Jusqu'où iront-ils ?
13. Culinaire lingus
14. Solo batterie / Quasimodo
15. Les grands espaces bleus
16. Docteur man


Christian Décamps - Chant, claviers, guitare   
   Tristan Décamps - Claviers, chant, choeurs
Hassan Hadji - Guitare, choeurs    
   Thierry Sidhoum - Basse, guitare
Benoît Cazzulini - Batterie   
   Caroline Crozat - Chant