Techniquement, c'est pas mal, le show se termine bien et Axelle a une chute de reins pas permise |
Note globale |
Musicalement, la France a perdu une bataille. Et la guerre aussi, tiens. |
Editeur
: EMI
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Durée
totale : 2 h 38
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- - Image PAL |
Pub
française (1 min) |
Au niveau technique c'est fabuleux : définition haut de gamme, couleurs naturelles, vraiment fantastique. Mais de temps à autres le monteur prend un coup de sang et se la pète djeunz, donne mal aux yeux et plombe le tout. Tiens, c'est Pullicino. Je vous jure que je l'ai pas fait exprès. | ||
C'est un tel bordel que forcément, la qualité en pâtit. Les musiques ne sont pas toutes au même niveau : Muse sature et est en mono ou peu s'en faut, chez Bocelli l'orchestre est inaudible, etc etc... Le mix stereo est de loin le meilleur, le plus homogène. Le 5.1 Dolby est une catastrophe au niveau saturation. | ||
Je me suis rarement autant fait chier, il n'y a pas d'autre mot, devant un concert. Aucune chaleur humaine, que des matuvu, 70% des intervenants n'étaient pas là pour l'Afrique mais pour montrer leur gueule. Tant mieux, c'est plus facile pour viser. | ||
Juste deux clips déjà présents sur le coffret 4 DVD. Vous l'avez déjà acheté, pas vrai ? Comment ? Eh oh, regardez-moi dans les yeux quand vous me parlez ! |
Qu'on se mette bien d'accord : le Live 8 était un concert politique pour un geste politique. Le but était d'éviter une catastrophe humanitaire en poussant les 8 géants de la planète à prendre des décisions, et non plus en parler de temps en temps, entre deux petits fours et une bouteille de DomPé '67. Le souci, et là on retrouve bien l'ambiance générale de notre cher pays, c'est que les organisateurs côté Cocorico se sont gourrés de but politique, et au lieu de faire campagne contre la famine en Afrique, ils ont organisé un grand happening social pour l'intégration des quotas de styles musicaux en France. D'un point de vue culturel et sociologique, partout dans le monde "notre" concert a été vu comme le plus réussi, le plus intégrateur, le plus bon enfant, le plus tout quoi. Sauf que musicalement, la "pauvreté" a subitement changé d'hémisphère, puisque nous avons ici une défaite cuisante de la fameuse exception culturelle française qui, à force de donner la parole à tout ce qui est censé être exclus, finit par s'exclure d'elle-même en oubliant de laisser la porte entrouverte histoire de revenir. | |
Soyons
carrément vicieux et passons au scalpel la tracklist (à
noter qu'il y a à peine dix minutes de doublon avec le coffret
4 DVD, ce qui serait exceptionnel si le reste valait le coup). Titre 1
: Alpha Blondy, reggae mal chanté qui remplit des quotas. Titre
2 : Passi, rapcaille yo yo matuvu-bling-bling qui fait partie d'un quota.
Titre 3 : Faudel, chant en playback et youyous de bazar avec texte qui
fait pitié devant tant d'angélisme aveugle, le tout pour
bien combler les quotas. Titre 4 : une énorme connerie qui, comme
toutes les conneries, fait désormais partie du patrimoine culturel,
en clâmant son droit inaliénable au quota de conneries. Titres
5 et 6 : oh ! Des musiciens ! De la mélodie, du rythme, de l'inventivité...
ah merde, c'est Muse, des angliches ! Impeccables comme d'habitude, avec
un Bellamy impérial et de la classe à tous les niveaux (ce
groupe va devenir énorme de chez énorme). Bon, question
fierté culturelle, ça la fout mal. Allez, revenons en France
s'il vous plait. Titre 7 : un titre chiant comme la pluie, faisant chanter
à une nana qu'elle "assume d'être ronde" parce
qu'elle doit faire à peu près 62 kilos au lieu de 59, appellant
à... hein ? à "pschitter l'anus" ? (...ça
n'me fait pas peur !), le tout plus commercial qu'une pub pour Nana, sauf
que Nana, au moins, ça retient les pertes. On enfonce le dernier
clou du cercueil avec M Pokora, affligeante râclure de fonds de
tiroirs, qui comme la chanson, enfin disons plutôt le titre précédent,
est là pour faire honneur aux quotas.
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On pourra trouver ce constat amer, passéiste, Guignolo-Cabrélien, avec beaucoup de mauvaise foi et même des relents racistes si on cherche trop loin. Sans compter que dire du mal des maisons de disques et de la culture française, c'est has-been, pas vrai ? Mais hélas, il faut avouer que la suite me donne raison : on a le droit (de refuser ?) au faux groupe de rock Kyo qui s'est fait en partie siffler (se faire siffler par tout le monde tout le temps, c'est louche les mecs, vous trouvez pas ?), à Raphaël et son épouvantable Caravane (mais putain, qu'il rentre dans un chameau !!!), à Yannick Noah qui commence à me sortir par les trous de nez, à Disiz la Peste qui est un pur néant musical, et à Florent Pagny qui vient brâmer une chanson classique libre de droits. La première chanson en français vraiment bonne, qui fait dandiner avec un joli groove (et un batteur complètement aux fraises, le pauvre), c'est Axelle Red. Ah merde, c'est une Belge. | |
Et
puis vient Diam's. Et là, tout ce qu'on croyait savoir sur la musique
s'écroule. On voit arriver sur scène l'équivalent
musical d'un pitbull sur ses pattes arrières, qui se met à
vociférer, sur un fond de bruit de machines hydrauliques. Disséquons
la pensée profonde de ses paroles. Elle débute son oeuvre
par "J'm'appelle Suzy et j'déchire". Ah. "J'm'appelle
Suzy et j'déchire". Tu l'as pas déjà dit ? "J'm'appelle
Suzy et j'déchire !". Déchire, quoi, des bouts de papiers
? Tu est une adepte des arts plastiques, ma petite, c'est ça ?
C'est bien. Comme disait Dieu, "chanteurs, chanteuses, faites de
la peinture, au moins ça fait pas d'bruit !". Ensuite, on
n'a rien compris, il y a un sanglier en rut qui grouine dans le micro.
On a juste compris des bribes de poésie urbaine, genre "j'kiffe
grave la life", et son nom gueulé assez souvent pour qu'elle
puisse elle-même s'en rappeler. Et là c'est pas issu d'un
quelconque quota. C'est issu des poubelles. Je rappelle qu'à Versailles,
on pratique le tri sélectif, les gars... "Heureusement"
qu'après on a Craig David, encore un futur gendre idéal,
avec son smoking, ses paroles à double sens et ses accords jazzy.
Non je déconne.
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Franchement, même pour une très bonne, une excellente cause, regardez le tableau : Diam's, Kyo, Pagny, Passi, David, Faudel, Magic System, Amel Bent, Raphaël, Disiz, Tina Arena : le pire de la musique est représenté dans ces deux heures trente à crever d'ennui à défaut de rire. Entre la chanson française néo-réaliste de mes deux, la racaille attitude à deux balles, le faux rock de bazar et les résidus de Star Ac', on a ici un merveilleux panel de la raison pour laquelle la France est totalement, complètement à l'ouest côté musique. Soyons sérieux deux minutes, quels sont ceux qui valent la peine ? Les anglais de Placebo (avec un titre en double sur le coffret), Muse, The Cure (honteusement sabré car "ils ne jouent pas de tubes". Et "Suzy 2003", c'est un tube peut-être ?), les frenchies David Hallyday (avec une reprise, bof, pouvait faire mieux), Bertignac (fausses notes inside) et Calogero (le seul français vraiment pro de la soirée), la belge Axelle Red, le franco-italien Cerrone (plus connu aux US que chez nous, bref), l'italien Zucchero, la mexicaine Shakira, et le camerounais Youssou N'Dour qui finit en beauté, heureusement, le concert. Tiens, il ne fait pas partie des quotas des radios, lui ? | |
Si mais on s'en tape. On n'est pas là pour faire de la politique, mais pour écouter de la musique : or, de toute la culture "non-gauloise" présente ici (50% du DVD), N'Dour est le seul à ne pas se foutre de la gueule du public (public français un peu à la masse, mais qu'attendait-on au juste ?). Ca fait vingt ans qu'il ne se fout pas du public. Et il sera encore là dans dix ans, en espérant que d'ici là la famine en Afrique, contre laquelle il se bat depuis presqu'autant d'années, aura été considérablement baissée. Dans dix ans, on espère que les Disiz, Diam's et autres Passi seront derrière les barreaux, et les Magic System et autres Amel Bent tiendront certainement un bar-tabac dans le 11ème. En attendant, si vous avez acheté le coffret Live8 4 DVD et que vous voulez continuer à faire une bonne action, vous avez Berlin, Toronto, Rome. Vous pouvez même télécharger le bootleg de Tokyo, personne ne vous en voudra. Mais celui-là, non, définitivement non. Ce DVD est un des pires de l'année, vous êtes prévenus. Mais d'après les échos que j'en ai eu, nul besoin de ma chronique pour le savoir. |
2 juillet 2005 - Versailles (France) |
Alpha
Blondy |
Non
crédités
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