Soin maniaque apporté à l'édition, humour en pagaille, des chansons magnifiques, les démos de Scarsick, public superbe, sous-titres sur le doc

Note globale


(Aux immaculées frontières du 8 quand même)


Quelques passages un peu froids, setlist bonne mais certains la remettront en question, technique pas vraiment à la hauteur, documentaire moins important que prévu

Editeur : Inside Out
Durée totale : 4 h 26

(quad) - -

Image        NTSC

Luxueux coffret thématique
Double CD du concert (son meilleur que sur le DVD)
Livret copieux d'une quarantaine de pages dont au moins dix de conneries
A propos de conneries, il y en a PARTOUT
Road-movie : "Six days eight worlds" (78 min st fr uk)
Deux commentaires audio du documentaire dont un qui n'a rien à foutre là
Galerie de photos de la tournée avec deux commentaires (7 min)
Bêtisier du commentaire (10 min)
Dea Pecuniae version foirée (9 min, 3 angles)
Galerie photos de la tournée Be (1 min)
Bande-annonce (1 min)
Daniel et Ikea (1 min)
Petit mot du réalisateur (1 min)
Galeries de photos de fans (3 min)
Johan live sans retour (1 min)
Credits (7 min !)
Versions live 2002 de Fandango et Undertow (11 min, audio)
Démos de Enter Rain, "Nine", Scarsick et "Skatesucker" (25 min, audio)

On pourra toujours se dire que le 16/9 est bienvenu, il n'empêche que le tout possède de nombreux défauts : caméras parfois à l'arrache, couleurs très baveuses, très peu de spectacle dans le montage, et surtout une définition indigne d'un live de 2007.
Comme pour Be, Daniel a choisi l'antique format quadriphonique, seulement cette fois il n'y a que de la réverb (splendide cela dit) et pas beaucoup, voire pas du tout, de spatialisation. La stéréo souffre de la compression et la voix se retrouve un peu noyée. La note monte à 8 pour le CD, aussi bon qu'on puisse l'espérer d'un groupe qui a toujours eu un petit son.
Pour être honnête, donnée telle quelle cette setlist est quand même une belle brochette de chansons magnifiques. Et aucun album n'a été oublié. Cependant, l'agencement presque chronologique casse un peu l'unité et on aurait volontiers échangé un Flame to the Moth par un Kindgom of Loss. Improbable tube, Disco Queen en live est un grand moment.
Il faut rendre justice à Daniel : la conception du coffret est incroyable. Nombreux sont ceux qui croiront avoir affaire à une vraie série américaine. Les menus regorgent de bêtises et vous aurez même besoin d'une lampe-torche pour vraiment voir TOUS les gags. Cependant, si les démos de Scarsick sont superbes, le reste des bonus se montre un peu en-dessous des attentes.

9h36. La radio me réveille avec le dernier remix d'Alicia Keys par Bob Sinclar. Je me passe la main dans les cheveux et attrape le fond de Sauternes qui traîne sur ma table de chevet. Les draps sont froids, Estelle s'est barrée voilà au moins trois heures. Elle est sûrement déjà au bureau, en train de taper un rapport sur la pollution des bus RATP par rapport au sommet de Copenhague et la volonté écologiste de Bertrand Delanoé. Je me gratte les burnes et passe à la salle de bain, traînant les pieds. Mon orteil heurte la bouteille de bourbon qui traîne par terre. Je devrais moins boire, c'est mauvais pour ma voûte plantaire.

10h01. Le facteur a déposé un paquet dans ma boîte. Une série américaine policière intitulée "Ending Themes". Je regarde le coffret, il y a plusieurs DVD. Trop long. Je jette la boîte par terre, et Brüno, mon berger allemand, se met à la déchiqueter.

10h46. Pas de SMS. Mon con de rédak chef devait me donner des ordres, comme d'habitude il n'a pas fait son boulot. J'écris ces lignes car je sais qu'il n'aura pas le courage de me censurer. La censure, c'est l'opium du nerf sciatique. Ah si, j'ai un message. C'est Paula. Elle veut me revoir. Elle veut qu'on baise. Elle veut des enfants avec moi, la grande vie, aller sur mon yacht à Mimizan. Ouais. Le rock, c'est la mort.

11h03 : Finalement j'avais un SMS. J'étais trop obnubilé par la mort de Casey Jonathan. Un rappeur bluesman dealer de cocaïne mort de 539 balles dans la poitrine à Los Angeles. Lavilliers ? Petite burne molle ! On ne connait pas vraiment l'univers de la rue tant qu'on n'a pas écouté Casey Jonathan. Je m'allume un tarpé et je réserve une table au Chanoine Lubrique.

11h09 : Après avoir fumé mon tarpé en hommage à Casey, je lis mon SMS. C'est mon rédak chef. Il m'ordonne de chroniquer le dernier DVD live de Pain of Salvation, un groupe culte de metal progressif suédois. Je me sens misérable, qu'est-ce que j'ai bien pu lui faire pour mériter une telle punition ? La valeur est un crime dont le prix est le pet que l'on contient. Je cherche partout ce foutu truc et après être tombé sur un vieux malabar machouillé par Amel Bent et mon intégrale dans le texte originel de Dostoïevski, je me rends compte que l'espèce de série américaine est en réalité un DVD musical.

11h10 : J'insère le DVD dans le lecteur et j'appelle mon rédak chef. Je tombe sur sa secrétaire, Nelly, 36 ans, brune bouclée dont seul le mari ne sait pas qu'elle s'est faite refaire les lèvres. Elle me dit que l'ordre est définitif et que mon papier doit arriver à la rédaction à 22h59 pile, pour le bouclage. Je lui laisse un mot pour rassurer le rédak chef. On sait tous parfaitement comment ça va se finir, et on est tous bien conscients que mon papier sera rendu à l'heure. Je lui stipule néanmoins d'aller se faire enculer, pour le principe.

11h11 : Je bande.

11h17 : J'entame le premier DVD, mais ce n'est pas le concert comme je le pensais ! En fait pour bien comprendre le principe du disque, il faut lire les textes, prendre les disques l'un après l'autre, plonger dans l'univers concocté par leur chanteur/guitariste Daniel Gildenlow. Je commence donc un documentaire rétrospectif sur la tournée du groupe en 2005. Drames, passions, alcool et Tibet. Rien de tout ça là-dedans. Juste des musiciens qui tentent de gagner du pognon en donnant du plaisir. Heureusement, c'est sous-titré en français. J'aperçois une copine à deux reprises, et la vue du Moulin Rouge me rappelle que je dois appeler Saïd.

12h34 : C'est presque la fin. J'entrevois la première partie de mon article. Ce sera grandiose et pathétique, une ode à la victoire du fric sur la consistance créatrice, entrecoupée d'un filet sur ma dernière partouze à Neuilly. J'appelle Saïd, on se retrouve comme d'habitude dans le square. Je me rends compte que le documentaire possède des commentaires audio. Je fume un pétard, et les commentaires se retrouvent dans le désordre. Puis un deuxième, Brüno appuie sur ma télécommande et je me retrouve avec le commentaire audio de Be, leur précédent DVD. J'ai soudain très faim.

13h00 : Saïd arrive avec sa bonne tête et ses blagues. Il me donne mes doses puis s'en va au loin vers son sympathique destin. Il n'a pas parlé de boulot. C'est pourtant grâce à lui que j'ai mis à jour la torride idylle sexuelle entre Heath Ledger et Maria Pacôme.

13h17 : J'entame l'apéro au Chanoine Lubrique. Mon repas sera constitué de croustillant fromage et homard, tournedos au basilic et petits légumes Frucditor, fromage d'époisse et tarte tatin au miel et cannabis. Le vin était succulent bien que dégueulasse, un Pouilly Brunoy 1983. J'ai fumé un pétard dans les chiottes. Un SMS : mon chef me demande si j'ai avancé sur le DVD. Je lui réponds que le temps est un concept relatif.

14h49 : Ivre mort, je m'affale sur mon lit.

14h52 : Brüno vient me mordiller les arpions. Il est temps de se remettre au travail. Je vais à la salle de bains, et je me masturbe en lisant du Houellebecq et en écoutant le concerto pour violoncelle n° 1 de Saint Saens. Je termine mon rail de coke qui gisait à côté du lavabo, on repart au boulot.

15h02 : J'entame le concert. Pas de doute, c'est du Pain of Salvation. Labyrinthique aux frontières du math rock. Daniel est assez en forme, il met du temps à chauffer sa voix mais une fois parti on ne l'arrête plus. J'aspire à fond tout une boite de résidu de chanvre et je me rends compte que Nightmist, groovy et impressionnante, est pompée sur Pipeline de Fish. Une grenouille à chapeau melon sort de la télé et vient me parler en arabe littéraire, je ferais mieux de me reprendre.

15h59 : Le spectacle continue. Etait-ce une bonne idée de jouer les morceaux presque chronologiquement ? Le téléphone sonne, c'est Estelle. Elle met dit qu'il y a une dinde dans le four, une bouteille de Pommeuil au frigo, et qu'à son goût le groupe ne joue pas assez de The Perfect Element. Je lui réponds qu'ils se permettent de jouer un des "brickworks" de leur album acoustique, que finalement le concert est super-bien agencé, et qu'elle n'est qu'une salope. Je raccroche et déjà je le regrette. Non. Le concert n'est pas si bien agencé que ça.

16h35 : Décidément, l'image n'est pas top. Je fume un pétard et je grimpe sur le toit. Je passe 7 minutes à démolir mon antenne avant de me rappeler que c'est un DVD et qu'on ne peut pas régler l'image. Saïd m'appelle. Il a une livraison marocaine qui arrive vendredi. Je raccroche et je finis mon concert tout en tapotant un SMS d'insultes à Serge July.

17h03 : Concert fini. Je passe aux bonus après une petite bouteille de vodka orange. Je me remasturbe en écoutant le discours de Dominique Strauss-Khan sur la parité monétaire, et je me mets au travail. En déchiquetant le paquet, Brüno a fait apparaître un texte écrit au fond de la boite. Quel groupe serait assez dingue pour aller écrire quelque chose à cet endroit?

17h17 : En fait PoS est beaucoup plus atteint que je ne le croyais. Ils ont mis des conneries partout. Et quand je dis partout, c'est partout. Il n'y a pas un atome de sérieux dans ce double DVD, sans parler du livret qui atteint des sommets. Je navigue dans les options et je tente l'option "hell".

17h52 : J'ai enfin trouvé comment sortir de cet écran de merde : j'ai fait péter les fusibles et bricolé une dérivation sur le transfo de mon voisin. Ce n'est pas grave, c'est la garçonnière de Jean-Paul Belmondo. Je remets le DVD. Ah, ils m'ont bien eu ! Il faut paraît-il des codes pour accéder aux bonus. Je n'ai pas le temps pour ces simagrées, je suis journaliste.

17h64 : J'ai enfin percé le code. Plein de bonus, pas toujours à la hauteur. On trouve surtout 4 démos audio du dernier album, et c'est super-plaisant. A ceci près que Daniel précise être enfin content du son de basse... évidemment, c'est lui le bassiste désormais ! La navigation compliquée m'a tordu les boyaux de la caboche. Je me sens soudain spleeneux.

18h30 : Paula m'annonce qu'elle va se suicider à la machine à pain si je ne l'épouse pas tout de suite. Je lui réponds qu'elle a toujours été une bonne pâte. Puis un drôle de bruit et plus rien. Bah, elle rappellera.

18h59 : L'angoisse de la page blanche. Que dire sur ce double DVD rempli jusqu'à la gueule mais finalement pas tant que ça ? J'ai envie d'un câlin, j'ai envie de dégrafer les soutiens-gorges de jeunes filles nues sur la plage de Ouistreham, j'ai envie d'un bon grog et d'un sanglier aux truffes, j'ai envie de commenter le tour de France en compagnie de Michel Drucker et Gérard Holtz. J'ai envie d'Estelle. Ma queue me fait terriblement mal et je dois aller racheter des yaourts 0% Taillefine.

19h32 : Je me réveille en sursaut avec un pivert dans la tête. Le chagrin est soluble dans le Chiroubles, le pancréas aussi. Il est l'heure d'aller dîner. Je sors précipitemment, ma feuille blanche à la main, et je prends une table au Gaulois Pensif. Au menu : crème de marrons et têtes d'asperges, côtelettes d'agneau en papillotte, riz complet, bavarois. Avec un succulent Tavel 1994. Je gribouille des phrases au hasard, tâchant de trouver quoi dire. Que m'a apporté ce concert de Pain of Salvation ? Que m'a-t-il retiré ? Daniel Gildenlow est-il vraiment plus doué que Raphaël ?

21h54 : J'ai griffonné "Monde de merde" sur la nappe en papier. Une vieille dame quitte le restaurant en m'accusant de ne vraiment pas être classe. Je l'envoie chier assez fort pour que Catherine Deneuve, qui est assise à la table en face, puisse m'entendre. J'ai reçu deux SMS : Saïd et mon patron.

22h36 : Je déguste un magnifique 1.000 feuilles dans la pénombre du square. Saïd me parle de sa famille, de son cousin qui est militaire à Assouan, de son crocodile domestique qu'il a baptisé Sim. Nous parlons philosophie, navigation, femmes. Je décide de rentrer lorsque je finis par apercevoir des dragons gris qui se cachent dans les fougères.

22h57 : Je me sens misérable. C'est dans ces moments-là que le métier me fait honte. J'ai reçu un message d'Estelle. Elle ne veut plus vivre avec moi. Je suis trop imprévisible. Je lui prouve le contraire en ne la rappellant pas.

22h58 : Tétanisé, je relève la tête. Je prends une coupe de champagne et relis ma prose commencée voilà une minute.

"Ce nouveau DVD live du groupe suédois Pain of Salvation, le premier présentant un concert complet, permet à la formation emmenée par le sympathique Daniel Gildenlow de revisiter l'ensemble de sa carrière au travers de chansons souvent longues, complexes, mais toujours baignées d'influences soul et privilégiant l'émotion à la technique. Malgré un budget insuffisant et un DVD qui ne fera pas date de par sa réalisation, les amateurs du combo seront ravis de retrouver leurs héros dans les conditions d'un concert, enquillant leurs meilleurs titres poussés par un public fervent. Le DVD, malicieusement présenté sous la forme d'une série américaine fictionnelle à la Twin Peaks, est parsemé de bonus divers, comme un documentaire retraçant l'épopée d'une tournée ou des galeries de photos, et nul doute qu'il s'agit là d'un cadeau idéal pour les amateurs d'un genre musical qui depuis quelques années renaît de ses cendres."

De la merde. Mais il est 22h59 et j'ai tenu parole : je n'ai plus qu'à envoyer le mail.

23h37 : Défoncé au Chardonnay, je suis réveillé par Estelle qui claque la porte et vient chercher ses affaires pour aller vivre chez sa mère. Je lui réponds qu'il n'y a pas besoin d'aller chez elle puisque je les ai baisées toutes les deux. Elle me lance un regard effrayant. Je verrai bien demain. Peut-être devrais-je m'excuser ? Chancelant, j'appuie sur un bouton et mon texte est envoyé par courriel.

23h54 : Un SMS. C'est encore mon rédak chef. Il est enchanté de mon compte-rendu sur le DVD et me charge pour demain soir d'écrire un article sur le style de journalisme gonzo. Je ne vois pas de quoi il veut parler, mais je vais l'appeler pour dire ok. Après tout c'est mon gagne-pain, tant que je n'aurai pas fini mon roman en 4 volumes sur la révolte prolétaire des paysans russes pendant la dictature du Tsar Nicolas II et l'avènement de soucoupes volantes dissimulées pendant 35 ans et revendues à Hitler en échange du contrôle de la Baltique pour faire des essais sur les greffes d'ADN.

23h58 : Le rédak chef est parti se coucher. Je lui laisse un message. Oh, évidemment, demain matin je serai levé dès potron minet pour accomplir mon vaillant devoir. Mais pour le moment, je lui laisse un message selon lequel il peut aller se faire enculer.

Pour le principe.


14-12-2009

2 mars 2007 - Paradiso (Amsterdam, Pays-Bas)


01. Scarsick
02. America
03. Nightmist
04. ! (Foreword)
05. Handful of nothing
06. New year's eve
07. Ashes
08. Undertow
09. Brickworks I
10. Chain sling
11. Diffidentia
12. Flame to the moth
13. Disco Queen
14. Hallelujah
15. Cribcaged
16. Used


Daniel Gildenlow - Chant, guitare   
   Fredrik Hermansson - Claviers, choeurs
Johan Langell - Batterie, choeurs   
   Johan Hallgren - Guitare, choeurs
Simon Andersson - Basse, choeurs